Ils ne portent ni costume, ni cravate. Leurs mains sont calleuses, leurs visages marqués par le soleil. Et pourtant, sans eux, aucune assiette ne serait pleine. En ce 1er mai, Fête du travail, Agriboost.info rend hommage à ces femmes, hommes et jeunes qui, chaque jour, labourent, sèment, récoltent et élèvent pour nourrir des millions de Congolais. Focus sur ces héros de l’ombre, piliers silencieux de l’économie rurale.
Kavira, 42 ans : la résilience au féminin
À Butembo, dans le Nord-Kivu, Kavira se lève tous les jours à 5 heures du matin. Sur son lopin de terre de 2 hectares, elle cultive du maïs, des haricots et du manioc. Mère de six enfants, elle subvient seule à leurs besoins depuis la mort de son mari. « Ce travail est dur, mais je ne peux pas abandonner. Si je ne vais pas au champ, mes enfants ne mangent pas », confie-t-elle, machette en main.
Son grand défi est le manque d’outils modernes. Tout se fait à la main. Et quand vient la saison des pluies, ses efforts sont parfois emportés par les inondations.
Son rêve est celui qu’un jour, elle possède une moto pour vendre sa production au marché, sans dépendre de tiers.
Jean-Claude, 25 ans : la jeunesse qui croit à la terre
À Kisantu, Jean-Claude a refusé de rejoindre la capitale comme beaucoup de ses camarades. Il a plutôt choisi de reprendre la ferme familiale.
Avec son diplôme d’agronome, il expérimente des techniques de compostage et de lutte biologique sur ses cultures maraîchères.
« L’agriculture peut devenir un vrai business, à condition d’être formé et soutenu », assure-t-il, entre deux récoltes de tomates.
Mais comme pour beaucoup de jeunes agro-entrepreneurs, l’accès au crédit reste un frein.
« Je suis prêt à embaucher, à étendre mes activités, mais sans financement, je stagne », souligne-t-il.
Mado, 58 ans : ouvrière dans une plantation de cacao à Tshikapa
Cela fait 27 ans que Mado travaille dans une plantation. Elle est payée à la tâche : un sac de cabosses récolté lui vaut l’équivalent de 1 000 francs congolais, soit un peu plus de 0,35$.
« Certains jours, je rentre avec à peine 5 000 francs (1,8$), alors que j’ai travaillé de l’aube au crépuscule », soupire-t-elle.
Aucune couverture sociale, pas de retraite, pas de congés. « Si je tombe malade, je perds tout. Mais je n’ai pas le choix ».
Son souhait est de voir l’État reconnaître les ouvriers agricoles comme de vrais travailleurs, avec des droits et une protection.
Un travail indispensable, mais encore très peu valorisé
La RDC, avec son immense potentiel agricole, repose en grande partie sur une main-d’œuvre rurale majoritairement informelle. Selon les données de la FAO, plus de 60 % de la population active vit de l’agriculture, mais sans accès aux droits fondamentaux des travailleurs : salaires décents, sécurité sociale, équipements adéquats.
La mécanisation reste un luxe pour la majorité, et les politiques publiques peinent à structurer ce secteur pourtant stratégique.
Alors que dans chaque sac de farine, chaque botte de légumes, chaque morceau de poisson fumé, il y a l’effort de ces hommes et femmes.
En cette journée internationale des travailleurs, il est temps de reconnaître leur rôle essentiel dans la souveraineté alimentaire du pays, et d’exiger pour eux ce que tout travailleur mérite : dignité, sécurité et respect.
MMK