Pendant la saison des pluies, plusieurs produits alimentaires inondent les marchés de Kinshasa et ses environs, à l’instar des feuilles de manioc, un trésor vert qui pousse à profusion. Ce qui est étonnant est que cette richesse naturelle finit souvent par être négligée, gaspillée ou même jetée, alors qu’elle pourrait nourrir des milliers de familles.
Dans les champs, les feuilles de manioc s’épanouissent, prêtes à être récoltées. Elles sont au cœur de la cuisine congolaise, avec des plats emblématiques comme le nsaka-madesu, entendez feuilles de manioc mélangées au haricot. En plus d’être savoureuses, elles regorgent de nutriments tels que les protéines, le fer et les vitamines essentielles pour la santé.
Pourtant, malgré leur abondance, beaucoup de ces feuilles se perdent, faute d’infrastructures pour les conserver et les transformer. Une fois récoltées, elles s’abîment rapidement, et ce qui pourrait nourrir des familles finit à la poubelle.
On pourrait penser qu’avec autant de feuilles disponibles, elles seraient accessibles à tous. Que non! Les prix sur les marchés de Kinshasa restent élevés, et beaucoup de familles n’ont pas les moyens de s’en procurer. Ce paradoxe s’explique par plusieurs facteurs. Les feuilles de manioc, souvent perçues comme “ordinaires”, ne bénéficient pas d’une réelle organisation pour maximiser leur potentiel.
De plus, leur transport depuis les zones rurales vers les marchés urbains engendre des coûts élevés qui se répercutent sur les prix.
Enfin, leur popularité maintient leur valeur élevée, même en pleine récolte, car elles sont un aliment de base dans presque tous les foyers.
Pourtant, les feuilles de manioc sont bien plus qu’un ingrédient de cuisine. Elles pourraient devenir une solution contre la malnutrition et un moyen de créer des emplois. Investir dans des techniques de transformation, comme le séchage ou la congélation, pourrait prolonger leur durée de vie et réduire les pertes. Sensibiliser les populations sur leurs bienfaits et les méthodes de conservation serait également un pas en avant. Regrouper les producteurs en coopératives agricoles permettrait de mieux gérer les récoltes, de réduire les pertes et de négocier des prix équitables.
Les feuilles de manioc font partie de l’identité congolaise, autant sur le plan culinaire que culturel. Elles méritent qu’on leur accorde plus d’attention. Au lieu de les laisser se perdre, elles peuvent être transformées en une opportunité pour bâtir un avenir meilleur.
À Kinshasa, la terre regorge de trésors. Les feuilles de manioc en sont un parfait exemple. Apprendre à les valoriser, équivaut à pérenniser la fonction de ce trésor vert à nourrir les familles congolaises et leurs ambitions.
Grâce-Léonie MUKALA